L’aquaponie est plus que jamais un sujet d’actualité en France et cette pratique suscite beaucoup d’intérêt depuis que les médias en parlent mais il reste encore beaucoup de fantasmes et de doutes autour de celle-ci. En effet, nous n’avons pas plus de 30 ans de recul sur cette nouvelle méthode de culture annoncée comme révolutionnaire face à l’hydroponie et à la bioponie.
Heureusement qu’il existe des groupes scientifiques qui n’aiment pas laisser le doute planer et qui oeuvrent pour faire éclater des vérités nécessaires à notre évolution. C’est ainsi que des chercheurs de l’équipe Developonics ont publié un rapport scientifique sur le très sérieux site du MDPI de Bâle en Suisse (Molecular Diversity Preservation International and Multidisciplinary Digital Publishing Institute (MDPI)).
Ce rapport expose une découverte majeure sur la croissance des plantes en aquaponie et en hydroponie… intéressant, non? Vous êtes prêt à découvrir la vérité? … Vous avez de la chance, je l’ai spécialement traduit et résumé pour vous.
Cet article est en quelque sorte la suite du round 1 aquaponie vs hydroponie que vous pourrez lire en parallèle ici : Aquaponie vs Hydroponie.
En résumé, ce qui dit le rapport…
L’équipe de Developonics a comparé les performances de croissance de la laitue dans trois systèmes NFT Aeroflo identiques mais avec trois solutions nutritives différentes : une solution aquaponique, une solution aquaponique complémentée et une solution hydroponique classique.
La solution d’aquaponie provenait d’un système aquaponique en aquaponie recirculante (RAS : Recirculating Aquaculture Systems) et sa concentration en nutriments était inférieure à celle de la solution hydroponique et de la solution aquaponique complétée.
La solution aquaponique complémentée était, elle, issue de l’eau d’aquaponie du RAS à laquelle ils ont ajouté les mêmes compléments que dans la solution hydroponique pure.
L’exposition à la lumière du soleil était strictement la même. Même température de la solution, mêmes paramètres à tous les niveaux pour qu’une stricte comparaison soit envisageable et que les résultats s’approchent le plus possible de la vérité.
Voici le détail des solutions utilisées, basé sur les taux optimums pour la croissance de la laitue :
Moyennes LS du poids frais des pousses et des racines et du rapport pousses / racines de la laitue récoltée :
L’aquaponie surclasse la culture hydroponique!
La principale conclusion de cette recherche était que les solutions aquaponiques et hydroponiques présentaient une croissance végétale similaire, alors que le poids des pousses dans la solution aquaponique complémentée montraient une augmentation du taux de croissance de 39% en moyenne par rapport aux autres traitements.
Ainsi, les résultats mettent en évidence l’effet bénéfique de l’eau du système d’aquaponie en recirculation sur la croissance des plantes.
Les résultats représentent une étape supplémentaire vers le développement de systèmes aquaponiques découplés (c’est-à-dire des systèmes à deux ou plusieurs boucles, comme décrit dans notre publication sur DAPS) qui ont le potentiel d’établir une alternative plus productive aux systèmes hydroponiques.
Pourquoi une telle différence de résultats?
Les scientifiques soupçonnent les micro-organismes et les matières organiques dissoutes de jouer un rôle important dans l’eau du système aquaponique et de favoriser la croissance des racines et des pousses des plantes. Ces résultats doivent encore être testés à plus grande échelle et dans des conditions de croissance végétale optimales (lumière, CO2, etc…), mais ils mettent scientifiquement en évidence le potentiel d’amélioration des rendements aquaponiques.
La solution nutritive aquaponique complétée a montré une meilleure performance de croissance que le groupe témoin hydroponique.
De ces résultats, nous pouvons conclure que l’utilisation de l’eau du système aquaponique stimule la croissance des racines et des pousses. Il est difficile de déterminer quel mécanisme a conduit à l’augmentation dans ce cas particulier, mais les micro-organismes et la matière organique dissoute sont soupçonnés de jouer un rôle important. Un accent particulier devrait être mis sur les espèces de matières organiques présentes, leurs effets sur la croissance des plantes, et leurs concentrations optimales.De plus, le microbiote disponible dans l’eau et dans la rhizosphère devrait être identifié; on peut supposer que la rhizosphère héberge des rhizobactéries et / ou des champignons efficaces favorisant aussi la croissance.
Cette recherche a démontré que les systèmes aquaponiques pouvaient dépasser les taux de croissance trouvés dans les systèmes hydroponiques conventionnels. Notamment, en ce qui concerne la rareté croissante du phosphore, il est remarquable que dans la solution aquaponique, des concentrations en nutriments significativement plus faibles donnent des rendements équivalents à la solution hydroponique.
C’est alors qu’on peut se demander ce que pourrait donner de l’hydroponie avec un biofiltre bien vivant. Est-ce que les bactéries et microorganismes résisteraient aux engrais hydroponiques classiques? Devrait-on plutôt opter pour la bioponie avec un biofiltre en plus pour augmenter les chances de développement bactérien? Vos témoignages sont les bienvenus.
Pour aller plus loin
Il aurait été intéressant d’ajouter deux solutions nutritives pour les tests : une solution bioponique et une solution aquaponique complétée avec les nutriments de la solution bioponique… je suis certain que les résultats auraient été très intéressants!
Si vous voulez voir plus de détails sur cette étude, téléchargez simplement le document (PDF) ou lisez-le en ligne : Si vous souhaitez le lire directement en anglais, vous pouvez télécharger le rapport ici.
Voici les sources et personnes ayant contribué à éditer ce rapport scientifique :
Boris Delaide : Laboratoire de pathologie végétale intégrée et urbaine, Université de Liège, Gembloux B-5030, Belgique
Simon Goddek : Chimie et technologie biosourcée, Université de Wageningen et recherche, Wageningen 6700 AA, Pays-Bas
James Gott 3 : Chimie et technologie biosourcée, Université de Wageningen et recherche, Wageningen 6700 AA, Pays-Bas
Hélène Soyeurt : Géographie et environnement, Faculté des sciences sociales et humaines, Université de Southampton, Southampton SO17 1BJ, Royaume-Uni
M. Haissam Jijakli : Unité de statistiques, d’informatique et de modélisation appliquée, Département AGROBIOCHEM, Université de Liège, Gembloux B-5030, Belgique
Ces auteurs ont participé à ce travail à part égale.
Éditeurs académiques: Jerald Lalman et Ranka Junge
Rapport reçu le : 6 juillet 2016 / Accepté le : 14 octobre 2016 / Publié le : 19 octobre 2016
J’espère que cet article vous aura permis de comprendre encore un peu mieux les mystères de l’aquaponie et de la culture hors sol. Pensez à laisser vos commentaires en bas d’article pour apporter votre pierre à l’édifice et échanger vos expériences et résultats.
A bientôt, bonnes cultures!
Pierre